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LA CONFÉRENCE SUR LE FUTUR DE L'EUROPE ET LA GOUVERNANCE DE L'UNION



La Présidence portugaise du Conseil est parvenue à finaliser un projet de Déclaration commune des trois Institutions relative à la Conférence sur le futur de l’Europe (1).


Ce projet doit encore être validé - ou amendé - par le Parlement (et éventuellement par la Commission).


Au-delà des questions matérielles d’organisation (telles que la co-Présidence et le Bureau) se pose la question centrale des sujets qui seront mis en débat. Le projet du Conseil donne - sans surprise - une liste une indicative des grands thèmes d’actualité auxquels se trouve confrontée l’UE dans ses principaux domaines d’activité. C’est sur cette base que se dérouleront les échanges entre les participants et que seront élaborées les conclusions de la Conférence.


L’impasse faite par le Conseil sur la gouvernance de l’Union ...

Mais il est surprenant que la question de la gouvernance institutionnelle ne soit pas mentionnée dans cette liste. Par gouvernance, il faut entendre la capacité de l’Union à mettre effectivement en oeuvre les réformes et les progrès qui seront proposés par la Conférence. Il semble en effet paradoxal et illogique que ces propositions soient avancées sans que soit prise aussi en compte la capacité des Institutions d’y donner suite.


Par exemple, il serait irresponsable de constater qu’une politique commune en matière de santé publique doive être instaurée - et de ne pas aborder parallèlement la question des moyens juridiques et institutionnels permettant à l’UE de mener effectivement cette politique. De même, s’il apparaissait nécessaire de renforcer certaines politiques existantes (par exemple celle de politique étrangère et de défense), il serait inconséquent de ne pas examiner en même temps les modifications nécessaires du processus décisionnel pour y parvenir (par exemple le recours au vote majoritaire au sein du Conseil).


En d’autres mots, l’examen du “futur de l’Europe” ne saurait être envisagé dans le cadre d’un "statu quo” des outils juridiques actuellement disponibles - qu’ils soient de nature réglementaire ou constitutionnelle. La Conférence ne pourra pas faire l’impasse sur une mise à jour - un aggiornamento - de ces outils dont les limites sont clairement apparues vingt ans après l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne.


Il apparait donc indispensable que cette question soit officiellement insérée dans le programme, l’agenda de la Conférence - en dépit du peu d’appétit apparent du Conseil pour en débattre sur la place publique. Conseil qui avait même, dans un première version de son projet, voulu exclure formellement la question institutionnelle. La formule proposée à ce stade se limite à prévoir que “chaque Institution donnera suite (aux propositions de la Conférence) selon ses compétences”.


… peut-être corrigée par le Parlement (et la Commission)

Il reviendrait donc au Parlement - qui y semble disposé (2) - d’exiger que cette question soit finalement insérée de façon aussi claire que possible dans la version finale du programme de travail de la Conférence adopté par les trois Institutions.


On pourrait imaginer qu’il le fasse en tenant compte de la distinction classique entre les réformes décisionnelles :

  • qui peuvent être décidées par voie réglementaire (cad à traité constant)

  • et celles qui exigent une révision de certaines dispositions du Traité.

Pour préparer cet exercice, le Parlement (en fait sa Commission des Affaires Constitutionnelles - AFCO) pourrait mettre à jour les propositions très précises qu’il a déjà élaborées sur ce thème. Il pourrait inviter la Commission - qui s’est à plusieurs reprises prononcée en faveur de réformes décisionnelles - à se livrer parallèlement à un exercice comparable dont les résultats devraient être largement compatibles.


À l’issue des travaux de la Conférence - en tenant compte de ses conclusions dans ce domaine - le Parlement pourrait adapter ses propres propositions et:

  • inviter la Commission à proposer les réformes nécessaires de niveau réglementaire,

  • prendre lui-même l’initiative de lancer une procédure de révision des traités en vertu de l’article 48 §2 TUE qui lui en donne la compétence (3).

Il est à présent question de lancer la Conférence en Mai 2021 - ce qui laisse encore le temps au Parlement (et à la Commission) de s’engager - et d’engager la Conférence - dans cette voie.


Evidemment, tout éventuel processus de réforme institutionnelle se heurtera à des difficultés considérables - comme le montre l’expérience passée. Mais des “passerelles” politiques et juridiques existent et pourraient être mises en oeuvre. On y reviendra. Jean-Guy Giraud 03 - 03 2021 __________________________ (1) https://www.euractiv.fr/section/avenir-de-l-ue/news/eu27-accept-portuguese-idea-on-conference-on-the-future-of-europe/ (2) "Vous conviendrez avec moi que ce ne sera plus un tabou que de vouloir modifier les traités pour les enrichir et faire en sorte que l’Europe puisse réagir efficacement” ( Président Sassoli - Conseil européen - 25/02/21) (3) Dans sa résolution du 15/01/20, le Parlement "s’engage à assurer sans attendre un véritable suivi de la conférence, assorti de propositions législatives qui mettent en chantier des modifications aux traités ou d’autres changements; invite les deux autres institutions à prendre le même engagement” - voir https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2020-0010_FR.html

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