Déclaration de M. Bruno Le Maire à son arrivée à la réunion informelle des ministres européens des Affaires économiques et financières (Gand, Belgique, 23 février 2024)
L’inflation est vaincue
Je voudrais dire aussi qu’aujourd’hui à cet ECOFIN, nous allons pouvoir marquer notre victoire contre l’inflation. Nous sommes arrivés en deux ans à briser l’inflation en Europe, là ou dans les années 70, il avait fallu plus de dix ans pour nous débarrasser de l’inflation qui pèse très lourdement sur tous les citoyens européens, sur tous les ménages, là en deux ans, les banques centrales, la Banque centrale européenne et les ministres des Finances sont arrivés à briser l’inflation. C’est un beau succès collectif, un succès important pour l’Europe, je tiens à le souligner.
Il faut à présent libérer la croissance de ses chaines
Maintenant, nous avons une nouvelle bataille décisive devant nous. La bataille décisive, c’est la croissance. Personne ne peut accepter que la croissance européenne soit un point en dessous de la croissance américaine. Personne ne peut accepter que les perspectives de croissance en Europe, ce soit la récession ou la stagnation. Nous devons donc livrer cette bataille de la croissance en Europe, cette bataille de la prospérité et cette bataille de l’emploi.
Pour cela, il faut libérer la croissance européenne de ses chaînes. La croissance européenne, elle est enchaînée et la responsabilité des ministres des Finances, la responsabilité des ministres de l’économie, c’est de libérer la croissance européenne de ses chaînes. Je vois aujourd’hui trois chaînes qui doivent être brisées sans délai. La première chaîne qui empêche le développement de la croissance européenne, c’est l’argent, il n’y a pas assez d’argent disponible. L’argent des Européens, il dort, au lieu de travailler et si nous voulons que l’argent des Européens travaille au lieu de dormir, il faut mettre en place l’Union des marchés de capitaux, la mettre en place sans délai. Dès 2024, il doit y avoir des progrès sur l’union des marchés de capitaux.
Mobiliser l’épargne privée grâce à l’union du marché des capitaux
L’épargne des Européens, c’est combien ? 35 000 milliards d’euros. 1/3 de cette épargne, plus de 10 000 milliards d’euros dort sur les comptes bancaires. L’argent des Européens ne doit pas dormir, il doit travailler à la croissance, il doit travailler à l’innovation, il doit travailler à la recherche, il doit travailler pour les entreprises, il doit travailler pour l’emploi. Il faut donc, je le redis, mettre sans délai sur place l’union des marchés de capitaux. Je vois bien que les choses traînent. Étant un ancien ministre des Finances j’ai le recul pour vous dire que je ne peux plus accepter que les choses n’avancent pas.
"L’appel de Gand" aux États volontaires"
Je lance donc ce matin à Gand, un appel. Un appel à tous les États européens qui le souhaitent pour lancer l’union des marchés de capitaux sur une base volontaire. Ce sera peut-être deux, trois, quatre étapes, peu importe, mais nous voulons lancer aujourd’hui à Gant, l’union des marchés de capitaux sur une base volontaire et nous verrons quand est-ce que nous serons 27. Mais comme il est impossible de démarrer tout de suite à 27, démarrons à quelques un sur la base de trois propositions concrètes.
La supervison, le produit d’épargne européen, la titrisation
D’abord une supervision européenne volontaire qui pourrait être exercée par l’autorité des marchés financiers européen. J’appelle donc les banques d’affaires, les bourses, les gestionnaires d’actifs à rejoindre cette supervision volontaire qui pourrait être exercée par l’autorité des marchés financiers européens. C’est une première proposition très concrète que je fais à tous les gestionnaires d’actifs, toutes les banques d’affaires, toutes Les Bourses européennes qui le souhaitent pour participer sur une base volontaire à cette supervision.
Deuxième proposition très concrète, je propose que nous mettions en place un produit d’épargne européen avec les États qui le souhaitent. Lançons dès 2024 un produit d’épargne européen, dont nous définirons les caractéristiques, le rendement avec les États volontaires qui le souhaitent.
La troisième proposition, mettons en place une garantie pour la titrisation de façon à ce que les titres arrêtent de peser sur le bilan des banques et que les banques puissent par conséquent prêter plus aux particuliers et prêter plus aux entreprises.
Démarrer à quelques uns dès 2024
Voilà l’appel de Gand que je lance ce matin pour une union des marchés de capitaux volontaire avec les États qui le souhaitent, supervision européenne volontaire, produit d’épargne européen volontaire, titrisation volontaire pour les États qui le souhaitent, des banques qui le souhaitent et nous verrons combien d’États pourront nous rejoindre mais au moins nous ferons l’expérience concrète, dès 2024, de ce que permettra concrètement une union des marchés de capitaux pour briser cette première chaîne de la croissance européenne qui est le manque d’argent.
Vous voyez bien que les besoins d’investissement sont considérables. Il n’y a plus d’argent public. Il faut bien qu’il y ait d’investissements privés. Pour financer l’intelligence artificielle, pour financer la transition climatique qui demande des dizaines de milliards d’euros d’investissements chaque année. Il est temps que nous passions à autre chose. Il est temps que nous décidions. Il est temps que nous mettions en place cette union des marchés de capitaux pour financer les investissements colossaux dont nous avons besoin dans les années qui viennent.
Les normes et la titrisation
La deuxième chaîne, ce sont les normes. J’appelle là aussi à une simplification drastique des normes européennes. Le continent européen doit pas être le continent des normes, il doit être le continent de la prospérité. Moins de normes, moins d’administration, moins de contrôle, plus de liberté pour les entreprises, plus de liberté pour les entrepreneurs, plus de liberté pour les start-ups, plus de liberté pour tous ceux qui créent la prospérité de la croissance. C’est la deuxième chaîne qu’il faut briser. Brisons la chaîne des normes pour ne retenir que les normes qui sont utiles pour l’environnement, qui sont efficaces et nécessaires et qu’on se libère de la sur-administration qui insupporte tous les citoyens européens et qui tuent la croissance européenne.
Enfin, la troisième chaîne, c’est le manque d’innovation. Il faut notamment sur l’intelligence artificielle qui va nous permettre de gagner en productivité et améliorer la croissance européenne, que nous soyons capables d’investir davantage sur les algorithmes, sur les supercalculateurs, sur les puces et semi-conducteurs, il faut que l’Europe investisse davantage. L’innovation doit libérer la croissance européenne, il ne faut pas qu’elle soit une chaîne pour cette croissance.
Vous le voyez, nous sommes en début d’année 2024. Je pense que maintenant que l’inflation est derrière nous, l’Europe doit prendre conscience que, si elle veut jouer sa partition au XXIè siècle entre la Chine et les États-Unis, il faut changer de logiciel. Le vieux monde est mort. Il y a un nouveau monde devant nous, si nous voulons dans ce nouveau monde, que l’Europe défende ses valeurs, sa place, ses intérêts économiques, il faut passer à autre chose. Il faut donner à l’Europe les moyens de sa prospérité et les moyens de sa puissance. C’est ce à quoi j’appelle ce matin à Gand.
JG Giraud 26/02/2024
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